Regards d'experts

Étude

91 % des Français veulent que les marques offrent du contenu

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56 % des Français jugent l'éditorial plus utile que la publicité dans leur parcours d'achat. C’est l’un des enseignements de l’étude du CSA « Media Impact ». Vincent Georget, qui a supervisé l’étude, décrypte les tendances à suivre pour les marques.

9 Français sur 10 jugent les médias utiles dans leur parcours d’achat. Ce résultat vous-a-t-il surpris ?

Vincent Georget : C’est un gage fort et un signal de confiance adressé aux médias dans un contexte de défiance générale (fake news, privacy, …) sur fond d’indicateurs citoyens bas. Cela confirme le rôle des médias et l’appétence des Français pour la consommation : les marques constituent, pour eux, des marqueurs identitaires essentiels.

Pourquoi l’éditorial prime toujours sur la publicité dans le cœur des Français ?

L’éditorial, c’est-à-dire tout ce qui n’est pas perçu comme de la publicité, constitue à la fois une expérience plus positive (71% vs. 58% pour la publicité) tout en délivrant une efficacité plus forte (56% vs. 49%). Il présente également l’avantage d’être plus linéaire que la publicité sur les différentes étapes du parcours d’achat.

Si la publicité reste la plus efficace sur son rôle premier de découverte ou de connaissance d’une marque, c’est ensuite l’éditorial qui prend le lead sur l’agrément, l’achat et la recommandation. On sait les Français par nature très critiques envers la publicité d’autant plus qu’ils sont rodés à décrypter ses logiques. L’éditorial répond donc mieux à leurs attentes et à leurs exigences de pédagogie, de compréhension et de transparence. Finalement, c’est plutôt le bon score de la publicité, dans notre enquête, qui est étonnant !

Pour quelles raisons les Français sont-ils critiques vis-à-vis de la publicité digitale ?

En matière de publicité digitale, il faut d’abord différencier le « search » du « display ». Si, dans un contexte d’achat ou d’information, le search, c’est-à-dire les liens et suggestions proposés, s’en sort bien, notamment sur les étapes de découverte et de connaissance des marques, le display, qu’il soit classique ou vidéo, cristallise une posture négative en termes d’efficacité pour les Français.
A contrario, son pendant éditorial qui va mettre en scène les marques dans des articles et des contenus digitaux est bien mieux évalué, à des niveaux qui restent en deçà de ceux de l’éditorial TV mais qui rivalisent avec ceux de l’éditorial presse. Sur certains secteurs comme les Telecom, l’éditorial digital est même leader.


Comment expliquez-vous ce désamour pour la publicité digitale, et au contraire cet intérêt pour l’éditorial online?

Plus d’un Français sur deux jugent la publicité digitale trop intrusive. Nous avons atteint un taux de saturation quantitatif et qualitatif. L’expérience proposée aujourd’hui génère des limites et des crispations. Si l’on ajoute à cela une proportion d’ad-blockers qui dépasse les 50% sur certaines tranches d’âge, le constat est clair : la publicité digitale n’a pas encore trouvé son cheval de Troie, son format ambassadeur, son 4 par 3. Elle est à ré-enchanter et nous tous, acteurs de l’écosystème de la publicité et du marketing, avons cette responsabilité d’imaginer l’expérience publicitaire digitale de demain.
Aujourd’hui l’hétérogénéité des formats couplée à celle des supports n’agit pas en faveur de sa lisibilité. Naviguer de page en page, de site en site c’est un peu s’immiscer sur des terrains inconnus et discontinus où l’harmonie n’est pas de mise. C’est là un vrai défi pour la publicité et c’est, en contrepied, là que l’éditorial digital va se démarquer.

Quels sont les atouts de l’éditorial ?

L’éditorial c’est une posture, un vecteur de sens et surtout un récit différent qui va laisser place au temps long, au storytelling avec des partis-pris forts de langage, d’engagement et de pédagogie. On sait que par rapport aux messages des marques, les Français sont en attente de créativité mais que celle-ci doit aussi être rythmée par de la pertinence, de la crédibilité, de la cohérence et surtout de la transparence. L’éditorial permet aux marques de passer en mode « meaningful », d’orchestrer les bénéfices, les fonctionnalités et le sens. On revient là à des notions essentielles.


Quels sont les contenus à mettre en avant suivant les « moments of truth » ?

Quel que soit leurs teneurs, leurs natures, leurs objectifs… tous les points de contacts d’une marque avec son client ou prospect, du plus intime au plus global, doivent être projetés comme des « moments of truth ». La vérité, c’est celle que va et veut vivre le consommateur. Selon la dernière édition de l’étude Meaningful Brands d’Havas, 91% des Français veulent que les marques offrent du contenu. Le message est fort et les marques doivent s’y pencher en réfléchissant au sens des messages qu’elles veulent et doivent véhiculer, surtout quand on sait que plus de 50% du contenu des marques est perçu comme non pertinent par les consommateurs ! Ce qui est certain, c’est que les Français veulent que les marques partagent leurs valeurs, qu’elles soient engagées envers eux et porteuses d’une vision du monde. Facile, non ?

Quels conseils donneriez-vous aux marques pour choisir le média le plus approprié ?

De tout connaitre sur ceux à qui ils s’adressent ! Intermédiaires de choix entre la cible et le message, les médias impliquent d’être continuellement pensés de manière quantitative et qualitative. Il est primordial d’avoir une connaissance fine et approfondie (dimensions attitudinales et comportementales) de ses audiences pour délivrer le bon message, à la bonne personne, au bon moment.

Pourquoi les jeunes plébiscitent toujours les médias traditionnels ?

Plus globalement, on peut analyser que les médias dits traditionnels (TV, radio, print, affichage) constituent des valeurs refuge : ils sont immuables, ordonnés, rassurants, crédibles. Par exemple, dès qu’il se passe une actualité majeure, on se tourne symboliquement vers eux pour vivre et partager celle-ci avec l’autre. Posons-nous aussi la question de ce que représentent ces médias traditionnels pour des millennials ? Pour eux, ce sont quasiment, désormais, des médias disruptifs.